14 Novembre 2016

Kerguelen : le plus grand glacier français se meurt

Depuis 25 ans, les satellites observent la fonte record des glaces sur l’archipel des Kerguelen. Une étude récente l'a reliée à un changement de la circulation atmosphérique résultant de l’augmentation des gaz à effet de serre et du trou dans la couche d’ozone. A l'occasion de la COP 22, qui se déroule du 7 au 18 novembre 2016 à Marrakech, zoom sur le plus grand glacier français.


 

Quel est le plus grand glacier français ?

La Mer de Glace dans le massif du Mont-Blanc ? Perdu ! C’est le glacier Cook qui culmine à 1 050 m sur l’archipel des Kerguelen dans l'océan Indien. Situé aux portes de l’Antarctique, ce glacier est 2 fois plus étendu que l’ensemble des glaciers des Alpes françaises. D’ailleurs, on parle plus couramment de calotte Cook que de glacier Cook. 

Le constat sans appel des satellites

Mais en 40 ans (entre 1963 et 2003), sa surface a diminué de 20 %. Ce recul est même 2 fois plus rapide depuis 1991, d’après l’analyse des images acquises par le satellite SPOT-5 dans le cadre du programme ISIS du CNES. Cette fonte record contribue à l'élévation du niveau de la mer mais, plus encore, elle nous renseigne sur les changements climatiques et environnementaux majeurs s’opérant dans les régions australes et le vaste océan qui entoure le continent antarctique.

En 40 ans, le glacier Ampère de la calotte Cook a reculé d’environ 3 km. Cette animation intégre une image IGN de 1963 et 2 images SPOT-5 de 1991 et 2003. Source : Etienne Berthier (CNRS).

La plus grande étendue de glace française se meurt et on regarde ailleurs ?

Que nenni ! Une équipe de chercheurs internationaux emmenée par Vincent Favier du laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement de Grenoble s’est penchée sur les causes de ce déclin grâce à une approche complète combinant mesures de terrain, observations satellitaires (dont les images SPOT-5) et données climatiques. Verdict ? La perte en masse de la calotte Cook est essentiellement due à une sécheresse  associée à un changement de circulation atmosphérique résultant du réchauffement climatique et du trou d'ozone en Antarctique. Autrement dit : c’est l’homme (et la femme) qui en sont à l'origine !

Moins de dépressions et c’est le glacier qui déprime !

Mais attention, ce n’est pas la hausse des températures qui est pas la principale cause de de ce déclin, c’est la baisse des précipitations, c’est-à-dire des chutes de neige. “Depuis 1975, on observe un changement dans la circulation atmosphérique. Les dépressions se sont déplacées vers l’Antarctique. Elles n’arrosent plus les Kerguelen. Cette modification est une conséquence du réchauffement climatique et du trou de la couche d’ozone en Antarctique” explique le glaciologue. 

Quel avenir pour le grand glacier français ?

Difficile à dire, car les modèles climatiques actuels ont de grandes difficultés à reproduire précisément les changements de circulation atmosphérique s’opérant au-dessus des Kerguelen. Mais la suite du scénario s’annonce sombre, car l’avenir s’annonce chaud. Même en cas de retour des précipitations, le modèle des chercheurs prévoit la disparition de la calotte Cook au cours des prochains siècles. L'archipel pourrait alors reprendre son nom initial d’Îles de la Désolation... 

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Réalisation de mesures au GPS différentiel sur la calotte Cook en février 2013. Crédits : LGGE, Vincent Favier.

  

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Le CNES aux avant-postes face au rechauffement climatique

La 22e conférence sur le climat (COP22) se tiendra à Marrakech du 7 au 18 novembre 2016. Elle fait suite à la COP21 organisée à Paris en décembre 2015 qui avait abouti au 1er accord mondial concernant le réchauffement climatique. Ratifié en octobre 2016, cet accord historique est entré en vigueur. Les satellites en sont une des vigies  : 26 des 50 variables climatiques clés établies par le GIEC ne sont observables que depuis l’Espace. Le CNES participe cette année encore à cet événement incontournable.

Développés par le CNES, 2 nouveaux satellites dédiés aux émissions de gaz à effet de serre intégreront en 2020 cette flotte de ''gendarmes du climat'' :  MicroCarb pour le gaz carbonique et  Merlin pour le méthane.

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